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La culture free est à un tournant
Lionel Pourtau, sociologue, à la veille du grand teknival Occitek dans l’Aude

Le traditionnel teknival d’été dans le sud de la France, Occitek, a été décalé cette année au 28 août pour cause de mobilisation des services de secours et de sécurité sur l’anniversaire du débarquement en Provence. Dès ce soir et jusqu’à dimanche, 20 000 à 50 000 teufeurs devraient affluer sur le site de l’aérodrome de la Montagne noire, à la limite de l’Aude et de la Haute-Garonne. Lionel Pourtau (1), sociologue (Centre d’études sur l’actuel et le quotidien, Sorbonne), analyse pour Libération l’évolution du mouvement techno.

Les teknivals légaux attirent-ils un public différent ?

Oui, mais qui s’ajoute au public classique. Si on atteint 90 000 personnes ce week-end, c’est qu’on a l’ancien public plus un nouveau, déculpabilisé de venir dans ce genre d’événements puisque désormais l’« Autorité » leur dit que c’est légal.

La nouvelle réglementation a-t-elle enterré les petites free parties clandestines ?

Presque. Pourtant, la politique de Sarkozy a limité la casse. Il a quitté son ministère avant de terminer la mutation de la mentalité préfectorale, et son successeur semble moins motivé pour débloquer les situations des free parties. Paradoxalement, alors que ce sont les plus faciles à gérer et les moins susceptibles de créer du désordre, ce sont toujours les petits événements qui ont le plus de mal à être autorisés. Avant de partir, Sarkozy avait poussé ses préfets à le faire. Conséquences : on est passé de zéro autorisation à une trentaine pour des événements allant de 1 000 à 15 000 personnes. Les refus restant l’immense majorité des cas. Mais certains préfets commencent à se dire qu’il va bien falloir qu’ils tentent le coup et que leurs collègues qui s’y sont essayés ne s’en sont pas si mal sortis.

Dans le département du Nord, en juin dernier, c’est la préfecture qui a débloqué la situation face à la mauvaise volonté des élus locaux. Même la nature de ces refus a aussi, en partie, changé. Certains ne sont pas toujours le résultat d’une volonté d’interdire a priori, mais juste d’une incompréhension des spécificités du mouvement et de la limite de ses moyens financiers, en particulier pour assumer les coûts des normes professionnelles : « 2000 personnes vous dites ? Bon et bien il faut louer 50 toilettes chimiques », a-t-on ainsi entendu. Or ces rassemblements, gratuits et libres, ne génèrent pas d’argent.

Ensuite, on assiste à un redémarrage de free parties dans certaines régions (Bretagne, Sud-Ouest, Sud-Est) mais de toute petite taille : moins de 100 personnes. Ce que l’on appelle des « calages » dans la culture technoïde. Les sound systems [DJ et techniciens, et leur matériel de diffusion sonore, ndlr] qui y participent sont moins inquiétés. Il semble que le ministère de l’Intérieur ait passé des consignes pour limiter la répression lorsque les événements font moins de 900 personnes. Reste à savoir si cet arrangement, passé avec le cabinet de Sarkozy avant son départ, va continuer.

La techno est-elle en voie de décomposition ?

Il est encore trop tôt pour en juger. La techno marchande ne se porte pas mal car c’est elle qui bénéficie de l’aura des teknivals légaux. Des producteurs peu scrupuleux lancent même des compilations « Sound of Free Parties » avec des musiciens qui n’y ont jamais participé. La techno marchande, elle seule, a les moyens de répondre au haut niveau d’exigence bureaucratique demandé par les préfectures lorsqu’elles se décoincent. Soit par peur du risque, soit par paresse, la scène commerciale tourne avec la même quinzaine de DJ depuis quinze ans. La free party, elle, est à un tournant. Tout est plus compliqué, plus difficile, plus rare mais une partie des acteurs recommence à tenter des choses et certains parmi eux y arrivent. L’avenir nous dira s’il s’agit d’un nouveau départ à partir de presque rien ou d’un dernier soubresaut d’agonie avant la mort. On a pu craindre un temps que la répression réussirait à écraser ce mouvement culturel, handicapé par sa volonté de refuser à la fois le marché et l’Etat. Pourtant on observe encore une extraordinaire motivation.

Les anciens prennent leur retraite (comme ils la prenaient avant) mais de jeunes sound systems continuent à se former, y compris à se mettre en communauté. Ils attendent, cherchent, fonctionnent sur des mythes et des légendes et sautent sur la moindre occasion de pouvoir exprimer leur art. Eradiquer l’expression d’un besoin social semble être plus difficile qu’il n’y paraît.

©Libération - 26/08/2004 Par Matthieu ECOIFFIER

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